4 ans les gars. 4 ans que j’ai posé un pied au Canada. J’ai vraiment du mal à y croire. Pour plusieurs raisons: Astrid version 2014 me semble tellement loin de la version 2018, le temps parait à la fois être passé super vite et en même temps j’ai l’impression que 2014 c’était il y un million d’années. J’étais venue seulement pour une année, une parenthèse dans ma vie valentinoise, pour prendre l’air et revenir plus forte. Mais c’est la beauté de la vie: rien ne se passe jamais comme on l’avait prévu. C’est mieux.
Premier bilan: entre ma première et ma deuxième année.
Petit recap si tu prends le train en chemin: mon premier départ et mon retour.
Je suis revenue depuis presque 1 an et demi maintenant. La plus grosse différence entre ma première année et aujourd’hui: mon quotidien. En 2014 je me sentais de passage, je profitais de chaque seconde sans avoir la moindre idée de ce que j’allais faire à la fin de mon visa. Je découvrais tout, mon premier hiver, mes premières fêtes traditionnelles canadiennes.. J’avais la vie d’une étudiante en transition. Aujourd’hui tout est différent. J’ai crée mon quotidien. J’ai une vraie vie ici, pas une vie d’étudiante. J’ai un vrai job qui me plait, plus un job alimentaire et transitoire. J’ai un appartement seule, comme lorsque j’avais une vie bien installée à Valence. Je n’ai pas de date de fin à Toronto. Ce n’est pas un secret j’en ai parlé dans mes stories, je suis en train de faire ma demande de résidence permanente pour rester au Canada après mon visa actuel (qui se termine en février 2019). Je construis ma vie ici, j’ai mes amis, mes habitudes. Je ne me sens plus de passage. Je sais à quoi ressemble l’été, je sais à quoi ressemble l’hiver, je connais les habitudes canadiennes et maitrise les différences culturelles. Bref j’ai acheté des meubles si ce n’est pas une preuve d’engagement ca ! Bien sûr il n’y a rien de définitif comme je vous disais dans l’article « Et dans 5 ans« . Bosser dans le digital ouvre de grandes portes et une certaine mobilité, puis comme si je dis souvent si je rencontre un mec canadien je pourrais bien me retrouver coincée avec des hivers de 6 mois pour encore quelques années ;).
Deuxième bilan: professionnel.
Par où commencer … En 2014 j’ai quitté une bonne situation professionelle pour postuler à des postes bien en dessous de mes compétences. Je m’y étais préparée, je savais que je passerai par des jobs moins épanouissants pour financer mon expérience canadienne. Difficile sur une première année de trouver un job qui colle, certains y arrivent et je leur tire mon chapeau, c’est tellement court et intense. La gestion du travail / des émotions / de la découverte est un peu compliquée. Depuis évidemment les choses ont bien évolué mais je ne regrette pas le temps que ca a pris. Chacun de ces jobs m’a appris quelque chose que je peux réutiliser aujourd’hui. Concernant mon retour en France la partie professionelle a été plus difficile, j’en parlais dans cet article. J’ai vraiment eu du mal à retrouver ma place. Ce que je vends aujourd’hui en entretien c’est mon expertise dans le digital que j’ai obtenu grâce au blog et mes différentes expériences en freelance. C’est la meilleure carte de visite, aucune école ne vous apprendra le digital aussi bien que l’expérience puisque ce n’est pas une science exacte et surtout c’est une science en perpétuelle mouvement. Même en ayant retrouvé un job dans la communication je n’étais pas épanouie, le domaine communication/marketing/réseaux sociaux est encore très sous estimés en France. » Vous postez seulement sur Facebook ». C’est beaucoup plus que ca et je pourrais vous en reparler si ca vous intéresse vraiment. J’étais donc frustrée, pas épanouie et sans aucune perspective d’évolution pour me faire avancer. Aujourd’hui je sais que si je devais retourner travailler en France j’aurais beaucoup de mal à retrouver ma place, je n’ai pas les diplômes qu’il faut, quand le canadien cherche à savoir ce que tu vas apporter à l’entreprise et comment utiliser tes atouts pour l’équipe le francais fera principalement confiance à ton diplôme et se méfiera beaucoup. Le canadien n’a pas peur de l’engagement, en 2 semaines il peut te faire partir et le salarié peut faire de même alors qu’en France on se tape des 2 mois de préavis et de menaces de Prud’hommes pour un oui ou un non. On crée un environnement de méfiance dans les 2 camps, une frustration et un affrontement entre le patronnat et les salariés alors qu’on devrait marcher main dans la main avec l’objectif de faire tourner la boîte.
Troisième bilan: perso
Changement. C’est le mot qui résume le mieux ces 4 ans. D’une fille de 26 ans aux rêves un peu brouillon, qui courrait jusqu’à l’épuisement je suis passée à une fille de 30 ans toujours plus déterminée mais qui utilise mieux ses ressources. Cela n’a pas toujours été simple mais comme je vous en parlais dans cet article sur l’évolution naturelle de la vie (cette phrase fait penser à un documentaire à 5h du mat sur TF1 sérieusement ^^). On vit de tels chamboulements en arrivant: on veut rencontrer du monde mais on a aussi besoin d’entretenir les liens avec la France. Je l’ai déjà dit mais parfois j’ai l’impression de vivre sur 2 continents, 2 vies parallèles avec la pression de ne pas décevoir ceux de qui je me suis éloignée. J’ai aussi vu des amitiés se terminer, d’autres s’intensifier. Parce que nos vies n’arrivent plus à s’accorder et que les liens qui nous unissent demandent plus de travail que n’offrent de plaisir.
L’amitié ici est aussi un challenge. Je compare souvent ça à la télé réalité, on se rencontre grâce à une aventure commune, on vit une expérience de dingue ensemble, on s’attache très rapidement et on peut se retrouver à tous faire ensemble au bout d’une semaine. Mais aussi on rencontre des gens parce qu’il faut rencontrer des gens, qu’on ne veut pas être seul(e), qu’on ne connait personne et parfois après l’excitation du début on se rend compte que ça ne colle pas. Ces amitiés là s’effaceront naturellement avec le temps. Je dis souvent qu’on reste amis avec 50% des personnes qu’on rencontre dans les 3 premiers mois (stats issues du centre de recherches Astrid Moulin ^^).
Quatrième bilan: ma vision du monde
J’ai pris beaucoup de recul par rapport à ma situation. Pour être complètement honnête en arrivant je pensais un peu que j’étais la personne avec l’histoire la plus cool et j’avais envie que le monde entier réalise que j’avais quitté mon pays pour vivre ici, sans personne. Truc de dingue quoi. J’ai déjà une grosse tendance à me prendre pour le centre du monde (dixit ma famille hein.. moi je n’ai pas cette impression la^^) alors la j’avais un peu l’impression d’avoir marché sur la lune pour la première fois ou d’avoir trouver un remède à une maladie incurable (jamais dans l’exagération, je pourrais être de Marseille, no offense les marseillais 😉 ). Puis pas plus tard qu’avant hier j’étais dans mon Uber pool (tu partages un Uber avec quelqu’un qui va dans la même direction que toi, c’est 2 fois moins cher), le gars avait une petite vingtaine d’années, colombien, il m’expliquait qu’il était venu au Canada pour fuir la violence dans son pays. C’est l’exemple le plus récent mais j’en ai plein. On réalise alors qu’il y a 2 types d’immigrés au Canada: ceux qui n’avaient pas le choix et nous. Nous n’avons pas fui, nous voulons découvrir une nouvelle culture, s’ouvrir d’autres portes quant eux veulent survivre à un pays qui ne leur laisse que peu de chance. Je pense que c’est une des plus belles leçons de vie que j’ai apprise ici. Ca m’a appris à remettre mes problèmes en perspective et à prendre du recul. J’ai un pays où je peux retourner vivre sans problème, où je n’ai pas peur pour ma famille, où j’ai un des meilleur système de santé au monde, j’ai le droit de vote, j’ai le droit à l’avortement, l’éducation gratuite, je n’ai pas de menace de guerre, où j’existe en tant que femme.
Je me suis aussi améliorée en géographie ! J’ai découvert des pays dans le monde que je ne connaissais pas, des cultures qui m’étaient totalement étrangères. J’ai même découvert mon propre pays avec la communauté francaise qui vient des 4 coins de la France. Les uns metttent leurs courses dans des poches et mangent la couronne des rois quand je me sers d’un sac et mange une galette des rois. J’ai découvert Lille et l’Irlande grâce à mes rencontres ici. C’est comme si un nouveau monde s’était ouvert à moi.
Ce que j’aime ici:
- La simplicité de vie: laisse moi tranquille, je te laisserai tranquille. Si tu ne me dérange pas je ne te dérange pas.
- La sécurité: pouvoir marcher seule dans la rue la nuit sans avoir peur est un luxe que n’importe quelle française pourrait apprécier.
- La flexibilité au boulot: pouvoir quitter un job sans être prise par les sentiments, pouvoir partir à l’heure sans être fusillée du regard, pouvoir discuter ouvertement de ces projets pro sans faire peur à son manager, pouvoir concilier job principal et freelance sans culpabiliser ou devoir le cacher.
- La compétitivité positive: il n’y a pas de jalousie malsaine ici, au lieu de critiquer la réussite de leur voisin les gens essayent de faire mieux que lui.
Ce que j’aime moins:
- La société de consommation: c’est un truc de fou en Amérique du Nord, le shopping est un sport national. On est sans cesse sollicités. Il y a des soldes tout le temps. C’est assez déstabilisant au début et ça demande un peu de temps d’adaptation.
- Les relations amicales: je pense que chaque immigré s’est fait avoir par une de ses premières rencontres canadiennes. Les canadiens sont très accueillants et vous proposerons de se revoir mais en réalité vous n’avez que très peu de chance d’entendre reparler d’eux. La culture de l’amitié est différente. Nous avons tout à reconstruire, nos amis seront nos familles ici alors que pour eux ils ont déjà une vie, des habitudes, des amis et une famille ici. Ma seule vraie amie canadienne par contre est comme ma famille ici.
- L’hypocrisie et le politiquement correct: les canadiens n’aiment pas la confrontation quand nous nous aimons argumenter et avoir des conversations animées.
- La passion nord américaine pour la clim !!!
Ce qui me manque:
- Evidemment la proximité avec ma famille et mes amis.
- La bouffe, tout est plus sain et moins cher en France.
- Les longues soirées d’été à refaire le monde autour d’une piscine et d’un barbecue.
- Les balades en voiture en été à travers les champs.
- Le sirop, Monin ou Eyguebelle si vous m’entendez !
- Les conversations animées et passionnées avec des gens d’avis différents !
J’espère que ca vous donne un aperçu de ces 4 dernières années riches en émotions, en changement, en décisions, si vous voulez que je développe plus amplement un point faites le moi savoir dans les commentaires !
Bonne semaine et rappelez vous de vivre vos rêves !
Crédit photo: Chara Ho.
1 comment
Valence, le blogging et le Canada : 3 choses qui nous rapprochent ! 🙂 Merci de nous donner un petit aperçu pour notre voyage de cet été et Bravo pour ta demande de résidente, on avait loupé l’info ^^ concernant le monde du travail tu nous fais bien envie, peut être qu on ne reviendra pas ?